Fiscalité des indemnités perçues en fin d’activité (licenciement, retraite, …)
le 10 mars 2017 rédigé par Eve D'onorio MaFiscalite.com
Par Eve d’Onorio di Méo – Avocat spécialiste en Droit Fiscal
En cas de perte d’emploi ou de départ à la retraite, vous pouvez percevoir certaines indemnités de remplacement. Ces indemnités font l’objet d’une fiscalité particulière et il convient d’être vigilant quant à leur déclaration en matière d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux.
En principe, et selon les termes de l’article 80 duodecies du CGI, l’ensemble des indemnités perçues par un salarié en fin de contrat sont imposables à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires et notamment :
- l’indemnité compensatrice de préavis,
- l’indemnité compensatrice de congés payés,
- l’indemnité de non concurrence,
- l’indemnité de rupture anticipée d’un contrat de travail à durée déterminée (prévue par l’article L.1243-4 du Code du travail),
- l’indemnité de fin de contrat à durée déterminée (prévue par l’article L.1243-8 du Code du travail),
- l’indemnité de fin de mission d’intérim (prévue par l’article L.1251-32 du Code du travail),
- les primes annuelles diverses.
Par dérogation à ce principe, certaines indemnités perçues en fin de contrat bénéficient de régimes d’exonérations et de modalités d’imposition spécifiques.
v Indemnités de licenciement
Les indemnités de licenciement (versée en dehors d’un plan de sauvegarde de l’emploi) sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite la plus élevée des trois montants suivants :
- montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, l’accord professionnel ou interprofessionnel ou à défaut, par la loi,
- 50% de l’indemnité de licenciement perçue,
- deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture du contrat de travail.
La fraction des indemnités de licenciement exonérée en application des deux dernières limites ne peut excéder six fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale (PASS) en vigueur au moment du versement de l’indemnité.
Ce plafond est fixé à 231 696 € pour les indemnités versées en 2016 et 235 368 € pour les indemnités versées en 2017.
Le plafond d’exonération des prélèvements sociaux (cotisations sociales, CGS, CRDS) est fixé à 2 PASS, soit 77 232 en 2016 et 78 456 € en 2017.
Ces limitations s’appliquent au montant global des indemnités perçues (hors bien entendu les primes et indemnités qui sont imposables) au titre de la rupture du contrat de travail. Tel est notamment le cas lorsque les indemnités de licenciement sont versées par plusieurs entreprises.
La règle est identique lorsque le salarié est lié par plusieurs contrats de travail à des entreprises faisant partie d’un même groupe.
La fraction imposable de l’indemnité peut bénéficier du système du quotient prévu à l’article 163-0 A du CGI permettant d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt.
Le système du quotient consiste à calculer l’impôt correspondant à l’indemnité perçue en divisant le montant de ce revenu par un coefficient égal à 4, en ajoutant au revenu net global « courant » le chiffre résultant de cette division, puis en multipliant par le même coefficient de 4 la cotisation supplémentaire ainsi obtenue.
Certaines indemnités de licenciement sont toutefois exonérées sans limitation :
- l’indemnité légale ou conventionnelle
- les indemnités versées aux salariés justifiant de deux ans d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins 11 salariés et qui sanctionnent :
- le licenciement irrégulier intervenu en contrariété avec les règles de procédure,
- le licenciement jugé nul pour motif discriminatoire
- l’indemnité versée en cas de licenciement abusif sans motif réel et sérieux
- l’indemnité forfaitaire de conciliation prud’homale (prévue par l’article L.1235-1 du Code du travail),
- l’indemnité de licenciement des salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle dont le reclassement dans l’entreprise n’est pas possible ou refusé,
- l’indemnité de licenciement des journalistes professionnels (prévue par l’article L.7112-3 du Code du travail).
v Indemnités de rupture conventionnelle homologuée
Les indemnités versées à l’occasion de la rupture conventionnelle homologuée du contrat de travail lorsque le salarié n’est pas en droit de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire sont exonérées dans les mêmes limites que les indemnités de licenciement.
Le plafond d’exonération de 6 PASS est applicable.
La fraction imposable de l’indemnité peut bénéficier du système du quotient de l’article 163-0 A du CGI.
Les indemnités sont exonérées de prélèvements sociaux (cotisations sociales, CSG, CRDS) dans la limite de 2 PASS (77 232 € en 2016 et 78 456 € en 2017).
v Indemnités de départ en retraite ou pré-retraite
Les indemnités de départ à la retraite ou en pré-retraite sont exonérées en totalité sans limitation à hauteur de leur montant légal ou conventionnel.
Lorsque le montant de l’indemnité excède celui prévu par la loi ou la convention collective, l’indemnité est exonérée à hauteur du plus élevé des montants suivants :
- 50% de l’indemnité perçue,
- deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture du contrat de travail.
sans pouvoir excéder 5 PASS, soit 193 080 € pour les indemnités versées en 2016 et 196 140 € pour celles versées en 2017.
En revanche, sont exonérées en totalité sans limitation de montant, l’indemnité de cessation d’activité et l’indemnité complémentaire versées dans le cadre du dispositif « pré-retraite amiante ».
La fraction imposable de l’indemnité peut bénéficier :
- du système du quotient (article 163-0 A du CGI),
- du régime de l’étalement: répartition de l’indemnité à parts égales sur l’année de perception et les trois années suivantes (article 163 A du CGI). L’option, exercée lors du dépôt de la déclaration d’ensemble des revenus ou ultérieurement par voie de réclamation, est irrévocable.
Les indemnités sont exonérées de prélèvements sociaux (cotisations sociales, CSG, CRDS) dans la limite de 2 PASS (77 232 € en 2016 et 78 456 € en 2017).
v Indemnités de cessation forcée des fonctions des dirigeants et mandataires sociaux
Depuis le 1er janvier 2015, les indemnités perçues par les dirigeants et mandataires sociaux lors de la cessation forcée de leur fonction, notamment en cas de révocation, sont exonérées dans la limite de 3 PASS, à savoir 115 848 € pour les indemnités perçues en 2016 et 117 684 € pour celles perçues en 2017.
L’appréciation du caractère forcé de la cessation des fonctions dépend des circonstances de fait. Outre les cas de révocation, l’exonération est applicable si le contribuable peut rapporter la preuve du caractère forcé de la cessation de ses fonctions, par exemple si en raison du changement de contrôle de la société il n’a pu être maintenu dans ses fonctions pour des raisons objectives explicitées par les parties, ayant ainsi cédé à la contrainte en présentant sa démission.
En cas de cumul d’un contrat de travail et d’un mandat social au sein d’une même société ou de l’exercice d’une pluralité de mandats sociaux au sein de sociétés d’un même groupe, les limites d’exonération s’appliquent au montant global reçu au titre de la rupture de l’ensemble des fonctions.
Les indemnités sont exonérées de prélèvements sociaux dans la limite de 2 PASS, à savoir 77 232 € en 2016 et 78 456 € en 2017. Toutefois, si les indemnités de cessation forcée des fonctions excèdent 5 PASS (115 848 € en 2016 et 117 684 € en 2017), elles sont assujetties aux prélèvement sociaux dès le 1er euro.
v Indemnités versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)
Les indemnités versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, quelles que soient les modalités de départ du salarié (licenciement, départ volontaire, démission, départ en retraite ou pré-retraite) sont exonérées d’impôt sur le revenu pour leur montant total (à l’exception des indemnités imposables en application du droit commun).
Ces indemnités sont exonérées de prélèvements sociaux (cotisations sociale, CGS, CRDS) dans la limite de 2 PASS, soit et 77 232 € pour 2016 et 78 456 € pour 2017.
v Quel traitement pour les indemnités perçues en 2017 ?
La loi de finances pour 2017 (loi du 29 décembre 2016 n°2016-1917) instaure à compter du 1er janvier 2018 un prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.
Selon ce mécanisme, les revenus perçus en 2016 seront imposés en 2017 selon les modalités habituelles, et en 2018 seront imposés les revenus perçus en 2018.
Les revenus perçus au cours de l’année dite de « transition » que sera 2017 seront traités de manière dérogatoire. Afin d’éviter une double imposition en 2018 des revenus 2018 et des revenus 2017, l’impôt sur les revenus 2017 devra être « annulé » via l’application d’un crédit d’impôt modernisation du recouvrement (CIMR).
Toutefois, l’impôt sur le revenu ne sera « annulé » qu’uniquement pour les revenus dits « non exceptionnels ». Les revenus qualifiés d’exceptionnels par la loi resteront imposables et seront déclarés en mai 2018.
Les revenus « exceptionnels » sont les revenus qui ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement. Tels est le cas notamment :
- des indemnités de rupture du contrat de travail (à l’exclusion des indemnités de fin de contrat à durée déterminée et des indemnités de fin de mission d’intérim),
- des indemnités de cessation des fonctions des mandataires sociaux et dirigeants.
Ces indemnités, en tant que revenus exceptionnels, seront donc imposables en 2018 et ne seront pas prises en compte pour le calcul du CIMR.
Il résulte des travaux parlementaires (Rapport d’information du Sénat du 2 novembre 2016, n° 98, relatif au projet de loi de finances pour 2017) que les indemnités de rupture du contrat de travail concernent aussi bien les indemnités résultant d’un licenciement que d’une rupture conventionnelle ou d’un départ à la retraite.
Toutefois, aucune définition claire des « revenus exceptionnels » n’est donnée par les textes. Il conviendra d’attendre la position de l’administration fiscale et notamment les commentaires au BOFiP.
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